C’est quoi cette « Académie du Couteau » ?

"C’est quoi cette académie du couteau ?"

"Vous vous battez avec des vrais couteaux ?"

"C’est vrai que pour se défendre, c’est bien d’utiliser un couteau ?"

"Vous prônez le port d’arme ?"

"Ah ouais, l’ACDS c’est les gens qui font du couteau…"


Voilà toute une série de questions ou d’affirmations sur notre activité qui méritent, selon mois quelques précisions…


Bon, vous me direz : « C’est quand même vous qui l’avez choisi votre nom! »
Sauf que le nom (complet) de notre association est « Académie du Couteau et de la Défense en Situation »… Ce qui vous l’avouerez n’est pas tout à fait la même chose.

En effet, la phase pratique de notre apprentissage est basée sur l’utilisation du couteau… Mais tout simplement parce que cette dynamique se transpose aussi bien au travail à main nue qu’à celui au bâton ou même aux armes improvisées.

Il faut néanmoins nuancer l’utilisation du couteau, qui est avant tout un outil même si il peut parfois devenir une arme… Il faut bien se rendre, à l’évidence, que nous utilisons tous un couteau au moins une fois par jour et souvent plus. En tout cas, c’est mon cas et je n’en ai encore jamais utilisé un pour me défendre ou blesser quelqu’un. Le législateur Belge l’a d’ailleurs bien compris. La nouvelle loi sur les armes précise clairement que tous les couteaux sont considérés comme des outils et sont donc libres de détention tout en étant soumis à un port "légitime". Les seules exceptions étant les balisongs plus connus sous l’appellation « couteaux papillons » et les couteaux à lame jaillissante, ou couteaux "automatiques", qui eux sont totalement interdits.

Bref, en ville, il peut être considéré comme normal de porter un petit pliant et/ou un outil multifonctions pour ouvrir des colis, couper des cordes, effectuer une petite réparation, éplucher un fruit, manger... A la campagne, que ce soit pour le camping, la randonnée ou la chasse, le port d’un couteau fixe peut se justifier par l’exécution de certaines tâches.

Maintenant, il est clair qu’on peut s’interroger sur la nécessité de porter une machette ou un grand couteau de cuisine pour se promener au centre ville !

Il faut aussi mettre l’accent sur le fait que notre association milite pour une reconnaissance de l’artisanat lié à la fabrication des couteaux et que nous comptons en notre sein nombre de couteliers professionnels (le plus connus étant sans doute Fred Perrin) ou amateurs. La réalisation d’un couteau fait d’ailleurs parties des formations que nous organisons, tout comme la survie en milieu naturel (lors de cours partagés avec David Manise www.davidmanise.com ) ou encore le travail avec armes à feu pour les instructeurs ou les professionnels de la sécurité via Neurone Défense Système ( www.nds-ch.org ). En effet notre vision de la protection personnelle se veut globale et intégrée et ne saurait se limiter à son volet urbain ou même aux agressions intra espèces (à quoi sert de savoir se défendre face à une menace au couteau mais être incapable de survivre à une nuit perdu dans la nature ou coincé dans sa voiture au bord d’une route enneigée !).

Mais revenons à la protection perso au sens plus étroit, l’analyse des réalités d’une agression ne fut-ce qu’au travers des articles de journaux nous démontre que la plupart du temps le ou les agresseurs sont armés (peu importe le type d’armes). Car, pour un délinquant, le port d’un objet d’un le but de faciliter une agression n’est pas basé sur des critères légaux (celui-ci se moquant bien des lois), mais uniquement sur la nécessité d’augmenter ses probabilités de succès lors de celle-ci.

Bref, loin de nous l’idée d’encourager nos élèves à se promener le couteau à la main afin de jouer les redresseurs de torts… La base de notre entraînement reste l’analyse pro-active de l’environnement et les stratégies d’évitement et de négociation, qui sont les seules payantes à coup sûr. En effet, on ne le répètera jamais assez, on ne peut jamais être certain des conséquences physiques, psychologiques et légales d’un affrontement. Donc les personnes fantasmant sur la possibilité de se battre en duel au couteau ou d’égorger leur(s) adversaire(s) risquent d'être bien déçues par nos cours…

Maintenant, se pose tout de même la question du travail des armes dans un cours de protection personnelle. En effet, trop de systèmes proposent des solutions face aux agressions à main armée qui s’avèrent risibles car basées sur une méconnaissance totale de l’utilisation d’une arme… Une personne qui utilise une arme ne bouge pas et ne se présente pas comme quelqu’un qui est simplement énervé et veut « faire le coup de poing ». Et le potentiel de dégâts d’une arme quelle qu’elle soit n’a rien en commun avec celui d’un coup porté avec les poings, les pieds ou tout autre arme naturelle.

Enseigner l’utilisation d’une arme, c’est d’abord enseigner la responsabilité de l’utilisateur et les dangers de celle-ci. En ce qui concerne le couteau on montrera ou on expliquera donc les lésions produites par un coup de couteau. Le couteau va vite, il coupe, pique frappe sans relâche, change vite de direction… Bref il présente bien des dangers !

Tout au plus au niveau des applications en self défense peut-on lui reprocher un faible pouvoir d’arrêt. Il faut bien avouer qu’en dehors de certains coupes au niveau d’articulations ou de tendons permettant des dégâts biomécaniques ou certaines piques au niveau du visage ou de la colonne les coups portés avec un couteau laissent encore à celui qui les subit le temps d’être secouru voir de continuer à se défendre. Ce qui peut expliquer d’ailleurs le nombre de personnes survivant à une agression à l’arme blanche même si les séquelles physiques et/ou psychologiques sont souvent horribles pour la victime.

Constatant cela, on se rend compte que le couteau est loin de répondre aux nécessités principales de la légitime défense qui sont de faire stopper l’agression le plus rapidement possible et avec un minimum de dégâts pour l’agresseur et nous-même. Notons tout de même qu’une fois de plus cette considération n’entre pas en ligne de compte pour les professionnels du crime, qui eux comptent d’avantage sur l’impact psychologique de la vue d’un couteau, voir à celle du sang pour ceux frappant sans prévenir, qui peut plonger bien des personnes dans un état de choc. Et c’est surtout cet élément qui fait la nécessité d’un entraînement avec un couteau afin de comprendre la psychologie et les stratégies d’un agresseur et de là améliorer ses capacités à s’en prémunir. Qui mieux que celui qui a appris à se servir d’un couteau peut offrir à ses partenaires d’entraînement une menace réelle qui permettra à ceux-ci d’établir des stratégies de défense réalistes ? En effet une fois passé l’apprentissage des bases, on se rend vite compte que c’est celui qui prend l’initiative qui mène la danse… Manger ou être mangé… Toujours tricher, toujours gagner !

Il en est de même pour le travail avec les armes improvisées ou les objets contondants mais c’est un vaste sujet et pour cela je vous renverrai à nos cours…

Pour conclure, je voudrais dire également qu’enseigner un système ne saurait se faire au travers de DVDs ou de livres (et ce même si j’en possède moi-même un grand nombre de qualités diverses). Tous ceux-ci doivent être considérés comme des supports d’un enseignement direct qui seul peut assurer une transmission efficace et un contrôle des compétences. Le but réel de l’instruction étant tout de même avant tout de rendre l’élève meilleur.


Bien à vous,


Rodolphe

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